mardi 5 mars 2013

Le Cameroun a-t-il mal à sa sécurité ?


Yaoundé 5 mars 2013. Menaces. Cinq ans d’attaques de pirates nigérians dans la péninsule de Bakassi, rapts et assassinats à l’Est à la frontière avec la Rca, etc. le Cameroun est-il à la merci de bandes armées ? 

 
Déjà 14 jours que sept Français appartenant à la même famille ont été enlevés dans la localité de Dabanga, non loin du parc de Waza dans la région de l’Extrême-Nord. L’enlèvement a eu lieu le 19 février 2013 aux environs de 7h. Une poignée d’hommes armés ont braqué la voiture à bord de laquelle se trouvaient les touristes avant de fuir vers le Nigeria sur des motos. L’on sait depuis lors, que les sept Français sont aux mains de la secte nigériane Boko Haram, qui a revendiqué le rapt, vidéo des otages à l’appui. 

Si l’enlèvement des touristes français dans l’Extrême-Nord est quelque chose de nouveau, les exactions de Boko Haram dans cette partie du Cameroun, en revanche, ne datent pas de ce kidnapping. Certains médias camerounais ont régulièrement rendu compte de la présence nuisible de ces malfaiteurs venus du Nigéria sur le sol camerounais. Les deux pays partagent une longue frontière poreuse de près de 1200 km. 

Un peu plus loin, dans l’Est du Cameroun, l’on a essuyé plusieurs attaques attribuées à des rebelles venus de la République centrafricaine (Rca). Au cours des mois de septembre et octobre 2012, ces rebelles ont fait plusieurs raids au Cameroun, faisant cinq morts, dont un gendarme camerounais. D’autres personnes ont été enlevées et prises en otage dans les localités de Garoua-Boulaï et Yoko Siré. Les rebelles centrafricains, qui ont une base à 9km de Yoko Siré, selon le reporter du Jour dans l’Est, citant des sources sécuritaires, viennent régulièrement en terre camerounaise se ravitailler en vivre. Depuis lors, une équipe du Bataillon d’intervention rapide (Bir) a été envoyée pour tenter de sécuriser la frontière entre le Cameroun et la Rca, qui devenait un coupe-gorge pour les paysans locaux.  

Bakassi Freedom Figthers 

Dans le Sud-Ouest du Cameroun, les problèmes de sécurités sont également légion. Dans la nuit du 27 au 28 février 2008, un commando d’une quarantaine de personnes, venu de la mer attaquait trois banques de la ville de Limbé. Pendant trois longues heures, les assaillants vont opérer et s’en aller sans que les forces de l’ordre lèvent le petit doigt. Après cette attaque, le ministre de la Défense de l’époque, Rémy Zé Meka confiera à la Bbc qu’il était prévenu de l’assaut…
Dans la même région et plus précisément à Bakassi, le Bir a régulièrement maille à partir avec plusieurs groupes rebelles venus du Nigeria : Africa Marine Commando (Amc), Bakassi Freedom Figthers (Bff), etc. Assassinats, enlèvements suivis de demandes de rançons, sont quelques unes des opérations menées par ces assaillants.
Le 6 février 2011, le sous-préfet de Kombo Abedimo, dans la localité de Bakassi, Ayuk Edward Takou, et 12 personnes sont interceptés par des pirates. Rapt revendiqué par les Bakassi Freedom Figthers, un groupe armé opérant dans le Delta du Niger, qui exige une rançon. Ce même jour, dans la nuit du 6 au 7 février, des hommes armés à bord d’embarcations attaquent la brigade de gendarmerie de Mbonjo, toujours dans la péninsule de Bakassi. Le Commandant de brigade et un gendarme sont tués. Cinq ans déjà, que la zone de Bakassi est régulièrement l’objet d’incursions violentes de groupes armés nigérians.
Même la métropole économique Douala, n’est pas à l’abri des actes de brigandage spectaculaires. Le 18 mars 2011, un groupe d’hommes armé de fusils et d’explosifs lancent un assaut sur l’agence d’Ecobank de Bonabérie à Douala. Cinq personnes sont tuées au cours de cette attaque. Des suspects sont interpelés et remis aux mains de la Justice.

Bataillon d’intervention rapide

Au regard de ces multiples cas de grand banditisme et autres attaques aux frontières camerounaises, l’ont est fondé à se demander s’il y a une menace sur la sécurité au Cameroun. 

« Le Cameroun est exposé à de nouvelles formes de tensions et de menaces : la piraterie maritime, les coupeurs de route ou les réseaux de contre bande. Voilà ce qui expose le Cameroun à de nouvelles pressions sécuritaires », analyse le politologue Mathias Owona Nguini. 

Le gouvernement camerounais a-t-il pris ces menaces au sérieux et a-t-il pris des mesures qui s’imposent ? « Des mesures de sécurité ont été prises dans ce cadre avec la mise en place de certaines unités spécialisées ou spéciales telles que le Gpi, pour la gendarmerie national, le Bataillon d’intervention rapide pour l’armée de terre. Cela montre que le Cameroun a essayé de circonscrire ces menaces qu’il envisage d’ailleurs de résoudre en appui avec les pays frontaliers, notamment le Tchad et la république Centrafricaine », explique Mathias Owona Nguini.

Mais d’autres analystes pensent qu’il faut rester attentif. « Si on n’y prend garde, explique une source militaire, le Cameroun risque de devenir une base arrière pour toute sorte de bandits. S’ils se rendent compte que les frontières sont poreuses et que la sécurité est faible, eh bien, ils peuvent venir régulièrement prendre des otages chez nous pour ensuite aller les marchander. Il faut renforcer la sécurité à nos frontières et même à l’intérieur du pays. Quand je vois que la partie de l’Extrême-Nord du Cameroun est classée zone dangereuse, j’ai mal. Il faut faire quelque chose pour rassurer non seulement nos compatriotes, mais également des touristes qui apportent quand même un peu d’argent à notre pays. »
Jean-Bruno Tagne

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