mardi 5 mars 2013

Le parti de Kamto n’ira pas aux élections



Yaoundé le 5 mars 2013. Sénatoriales. C’est ce qui ressort d’une conférence de presse organisée hier au siège du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc). 

Yaoundé, 4 mars 2013. Maurice Kamto lors de sa conférence de presse
Maurice Kamto avait l’air grave hier, 4 mars 2013, au siège de son parti, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc). Non seulement le professeur est arrivé à sa conférence de presse avec quelques minutes de retard pour avoir passé près d’une heure dans les bouchons, mais en plus, le sujet de l’échange avec les journalistes, selon son parti, ne donnait pas à sourire : la convocation du corps électoral pour les sénatoriales avant les élections législatives et municipales. « C’est un acte grave », soupirent certains militants avant l’adresse du président du Mrc aux journalistes invités. Soucieux des questions de forme, le président national du Mrc rappelle toujours qu’il s’agit d’une position adoptée par le directoire de son parti après la décision du président de la république, le 27 février dernier, de convoquer le corps électoral pour les sénatoriales. 

Dès l’entame de son propos, Maurice Kamto donne le ton. « Le Mrc tient à dénoncer énergiquement les manœuvres provocatrices et les atteintes graves à notre démocratie balbutiante que constitue la décision inique de tenir les élections sénatoriales avant les élections municipales et législatives attendues cette année, et dont seul le président du Rdpc et son parti connaissent la date », affirme Maurice Kamto. Pour lui, la convocation du corps électoral pour l’élection des sénateurs est non seulement une « fraude à la loi », mais aussi « une atteinte grave à la démocratie » et « une tentative de découragement des Camerounais à s’inscrire sur les listes électorales ». 

Maurice Kamto dénonce l’illégitimité des conseillers municipaux actuels, qui forment le corps électoral des sénatoriales en ce sens qu’ils « ne tiennent plus leur mandat du suffrage universel, mais des décrets présidentiels successifs qui ont déjà prorogé leur mandat de 12 mois ». « Ils n'ont plus une légitimité issue du suffrage universel, mais une légitimité décrétale. Or c'est en vertu de leur propre légitimité populaire que les Conseillers municipaux peuvent conférer une légitimité démocratique aux sénateurs qui, je dois le rappeler, participent au processus d'élaboration et d'adoption des lois », poursuit-il. 

Pour ce professeur d’université, « en faisant des conseillers municipaux dont le mandat a expiré depuis juin 2012, et prorogé à deux reprises, le collège électoral des sénateurs, le président de la République prive les citoyens camerounais de leur droit à la « participation effective (...) aux processus démocratiques » stipulé par l'article 3(7) de la Charte de la démocratie, des élections et de la gouvernance de l'Union africaine, entrée en vigueur en 2012 à la suite de sa ratification par le Cameroun et qui s'impose donc à notre pays ». 

S’agissant de l’atteinte à la démocratie, le président du Mrc estime que « les élections municipales et législatives attendues étaient l'occasion de retremper les mandats des conseillers municipaux et des députés expirés depuis belle lurette aux sources de la légitimité populaire, de mesurer le poids électoral des différentes formations politiques qui occupent la scène politique camerounaise aujourd'hui ». Il poursuit : « Rien ne permet de croire que le RDPC aurait pu s'en sortir avec la majorité des suffrages et même des élus. C'est sans doute pour se prémunir de cette perspective incertaine que son Président a décidé de confisquer le Sénat au profit de son parti. » Il estime alors qu’il s’agit d’une « régression dramatique de notre démocratie tâtonnante ».

En toute logique, le Mrc, comme l’a affirmé à mi-mot son président, ne sera pas de la course pour les élections sénatoriales d’avril 2013. Mais il invite les Camerounais à continuer de s’inscrire sur les listes électorales pour sanctionner le Rdpc aux élections législatives et municipales prochaines.
Jean-Bruno Tagne

Déclaration du mouvement pour la renaissance du Cameroun
Maurice Kamto : "Le calendrier électoral tel qu'agencé exclut d'office de ce scrutin sénatorial les partis politiques qui n'ont pas de conseillers municipaux"
Le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) a pris connaissance, avec l'ensemble du peuple Camerounais, le 27 février 2013, de la convocation du corps électoral pour les élections sénatoriales par le Président de la République.
Parti républicain, le MRC a toujours tenu, en tout temps et en tout lieu, à affirmer son attachement au respect des institutions et des lois de la République, dans le souci de la préservation de la paix si chère à notre peuple et à lui-même.
Le MRC tient cependant à dénoncer énergiquement les manœuvres provocatrices et les atteintes graves à notre démocratie balbutiante que constitue la décision inique de tenir les élections sénatoriales avant les élections municipales et législatives attendues cette année, et dont seul le Président du RDPC et son parti connaissent la date.
1-   Une fraude à la loi
Le scrutin sénatorial se fait au suffrage indirect. Le peuple camerounais ne participe donc pas directement à ce scrutin. Il y participe cependant indirectement à travers le choix des Conseillers municipaux (et régionaux) qui forment le collège électoral.
En faisant des conseillers municipaux dont le mandat a expiré depuis juin 2012, et prorogé à deux reprises, le collège électoral des sénateurs, le Président de la République prive les citoyens camerounais de leur droit à la « participation effective (...) aux processus démocratiques » stipulé par l'article 3(7) de la Charte de la démocratie, des élections et de la gouvernance de l'Union africaine, entrée en vigueur en 2012 à la suite de sa ratification par le Cameroun et qui s'impose donc à notre pays. Or le Cameroun et les autres Etats parties à cette Charte « considèrent la participation populaire au suffrage universel comme un droit inaliénable des peuples » (article 4)
En disposant que le Sénat peut, le cas échéant, être mis en place avant l'élection des Conseillers régionaux, la modification constitutionnelle de 2008, ne donne pas au Président de la République un blanc seing pour procéder à la manipulation de la situation juridique du collège électoral résiduel des Sénateurs que constituent les conseillers municipaux. Il reste tenu par les règles régissant les régimes démocratiques pour autant que le régime camerounais en soit.
Le grave problème qui se pose n'est celui de la constitutionnalité de la décision d'organiser le scrutin sénatorial avant les législatives et les municipales, mais celui de la conformité d'une telle décision avec les règles et standards démocratiques auxquels le Cameroun a souscrit librement, notamment au niveau international. Faut-il rappeler que les Etats Parties à la Charte de la démocratie, des élections et de la gouvernance précitée fait obligation aux Etats de prendre « les mesures nécessaires pour établir et maintenir un dialogue politique et social ainsi que la transparence et la confiance entre les dirigeants politiques et les populations en vue de consolider la paix et la démocratie » (article 13) ?
Les Conseillers municipaux actuels ne tiennent plus leur mandat du suffrage universel, mais des décrets présidentiels successifs qui ont déjà prorogé leur mandat de 12 mois. Ils n'ont plus une légitimité issue du suffrage universel, mais une légitimité décrétale. Or c'est en vertu de leur propre légitimité populaire que les Conseillers municipaux peuvent conférer une légitimité démocratique aux sénateurs qui, je dois le rappeler, participent au processus d'élaboration et d'adoption des lois.
Le MRC réitère que le seul fait que la Constitution, dans sa modification de 2008 dispose que le Sénat peut être mis en place avant l'élection des Conseillers régionaux ne fonde pas la légalité du collège électoral des sénateurs dans sa situation actuelle. Le Président de la République a manifestement pris des libertés par rapport aux engagements internationaux du Cameroun en matière de démocratie, des élections et de la gouvernance.
2-   Une atteinte grave à la démocratie
Les élections municipales et législatives attendues étaient l'occasion de retremper les mandats des conseillers municipaux et des députés expirés depuis belle lurette aux sources de la légitimité populaire, de mesurer le poids électoral des différentes formations politiques qui occupent la scène politique camerounaise aujourd'hui. Rien ne permet de croire que le RDPC aurait pu s'en sortir avec la majorité des suffrages et même des élus. C'est sans doute pour se prémunir de cette perspective incertaine que son Président a décidé de confisquer le Sénat au profit de son parti.
Le calendrier électoral tel qu'agencé exclut d'office de ce scrutin sénatorial les partis politiques qui n'ont pas de conseillers municipaux.
En décidant d'organiser le scrutin sénatorial avant les élections municipales et législatives, il ne fait aucun doute que le Président de la République prépare un Sénat unicolore et monolithique, un Sénat tout aux couleurs du son parti. Après 22 ans de démocratie capturée, on attendait un peu mieux. Même s'il désignait parmi les 30 sénateurs qu'il a le pouvoir de nommer des personnalités issues des partis politiques alliés au RDPC, cela n'y changerait rien. Un sénateur nommé par le Président de la République, Président du RDPC, ne pourra agir autrement que comme un sénateur du RDPC, puisqu'il tiendra son mandat du Président du RDPC.
Il s'agit d'une régression dramatique de notre démocratie tâtonnante que le MRC condamne avec gravité et de la manière la plus solennelle.
3-   Une tentative de découragement des Camerounais à s'inscrire sur les listes électorales

Le pouvoir RDPC qui feint de se plaindre de la désaffection des Camerounais pour les inscriptions sur les listes électorales n'a cessé de les décourager depuis les élections pluralistes de 1992 en déclarant aux populations que les candidats du RDPC aux différentes élections seront élus, qu'on les vote ou que l'on ne les vote pas.
En cette année électorale 2013, alors que différentes formations politiques du pays se sont jetées dans la mobilisation des électeurs potentiels pour les inscriptions sur les listes électorales, ce pouvoir réfractaire à la démocratie tente de les démobiliser en détournant leur attention avec des élections sénatoriales dont ils ne sont pas électeurs, alors qu'Elecam dans sa campagne "fait croire le contraire. D'autre part, en anticipant ainsi les élections sénatoriales, ce pouvoir dépossède le peuple camerounais de la possibilité de mettre en place un collège électoral légitime à travers l'élection de nouveaux Conseillers municipaux.
Le MRC est convaincu que le cynisme politique ne peut payer éternellement et que le peuple Camerounais se rappellera le moment venu que ceux qui déclarent vouloir le voir aller nombreux aux urnes sont ceux-là mêmes qui mettent tout en œuvre pour l'en empêcher. En dépit de ces manœuvres grossières, le MRC réitère son appel pressant aux populations de s'inscrire massivement sur les listes électorales afin de pouvoir exercer le moment venu leur droit de vote et de changer pacifiquement un régime qui n'a ni du respect pour elles, ni de la compassion pour leurs souffrances, ni des réponses adéquates à leurs problèmes.
                                          
4-   L'Appel du Mrc aux Camerounais
Le MRC attire l'attention de la communauté nationale et internationale sur la multiplication des actes de provocations du peuple camerounais par le régime en place. Tout se passe comme si ce régime s'engageait dans la préparation de la déstabilisation du pays afin de plonger le Cameroun dans une crise politique et une rupture de la paix qui lui donnerait une nouvelle occasion d'exercer une répression aveugle et de reprendre le contrôle d'une situation politique dont il n'a plus la maîtrise complète.
Le MRC appelle le peuple Camerounais à la vigilance afin de ne pas tomber dans ce piège. Le pouvoir en place étant resté sourd et méprisant aux exhortations et à la mise en garde du MRC et d'autres forces politiques nationales sur les conséquences dommageables pour l'image de notre pays de la décision d'organiser les sénatoriales avant les municipales et les législatives, le MRC appelle les Camerounais à exprimer leur rejet de cette décision inacceptable en sanctionnant sévèrement le Rdpc dans les urnes lors des prochaines élections municipales et législatives.
Il invite naturellement l'ensemble des populations à poursuivre avec lui, dans la paix, le combat pour l'avènement d'une véritable démocratie au Cameroun.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire