Yaoundé le 9 janvier 2012. Hilaire Kamga. Le porte parole de la Plate forme de la société civile pour les élections émet des doutes quant à l’organisation d’élections libres et transparentes au Cameroun en juillet prochain.
Hilaire Kamga, porte parole de la Plate forme de la société civile pour les élections |
Le président de la République, lors de son discours d’investiture le 3 novembre dernier, tout en se félicitant d’une présidentielle qui s’était déroulée dans le « calme et la transparence », avait quand même noté qu’il y a des « réglages » à apporter au processus électoral pour son amélioration. Est-il sincère, à votre avis ?
Lors de la présentation des vœux, il a dit qu’il y avait des « dysfonctionnements ». Or, j’ai été sur le terrain et j’ai constaté que des morts ont voté, qu’il y a eu des votes multiples, etc. Si pour le chef de l’Etat, ce sont des « dysfonctionnements », pour nous ce sont des fraudes massives.
Le chef de l’Etat n’est pas sincère. On ne peut pas vouloir combattre des « dysfonctionnements » sans toucher le cœur ou le foyer à travers lequel ces dysfonctionnements se sont manifestés. Je veux parler du fichier électoral. Elecam a choisi de réviser les listes électorales au lieu d’en faire une refonte totale. Il n’y a pas de réglage possible. Depuis 15 ans, ce ne sont pas les propositions qui ont manqué. Mais, comme disait quelqu’un, le président Biya est comme un médecin qui fait de très bons diagnostics, mais ne propose jamais les ordonnances qui conviennent. J’ai de sérieux doutes quant à sa volonté de faire reculer ceux qui voudraient qu’on maintienne absolument un système opaque ; celui qui promeut l’arrivée au pouvoir de personnes qui n’ont aucune assise populaire et qui sont obligés de passer par un système frauduleux pour arriver au pouvoir. Le mal est profond. Ce ne sont pas simplement des réglages qu’il faut. Il faut absolument reconstruire un nouveau système électoral. Celui qui existe pour l’instant n’a pas été conçu pour garantir une dévolution transparente du pouvoir.
Par où faut-il commencer ?
Il faut commencer par le fichier électoral. Il ne peut être garanti que par la loi électorale qui organise sa construction. Comment on construit le fichier électoral au Cameroun ? Quels sont les acteurs qui y sont impliqués ? Et quels sont les pouvoirs de ces acteurs ? Le premier acteur, c’est Elecam. Or, Elecam a été une grosse escroquerie politique parce qu’on y fait cohabiter deux organes sans le dire : le conseil électoral, qui est supposé être l’organe qui gère l’élection alors qu’il ne gère rien du tout, et le directeur général des élections, qui n’est pas formaté pour produire un bon fichier électoral ou pour organiser de bonnes élections. Il ne faut pas simplement changer les membres du conseil électoral, mais il faut restructurer les pouvoir du Dg des élections. En l’état actuel, même si on nommait le cardinal Tumi, qui est pour moi le Camerounais le plus crédible, il ne ferait rien.
D’aucuns proposent également une loi électorale unique…
Il faut absolument créer une loi électorale de manière globale pour qu’on ait un code électoral unique. Et dans ce code électoral, il faut éliminer toutes les poches de conflits qui devraient exister entre les acteurs chargés de conduire les élections. Il faut également y extirper les expressions qui peuvent créer la confusion.
Mais je pense que le fichier électoral est l’élément le plus important. Ce qui tient lieu de fichier électoral remis par le Minatd et exploité par Elecam doit être jeté à la poubelle. On doit tout recommencer à zéro.
Tout cela est-il possible avant les élections de juillet prochain ?
M. Biya Paul ne peut pas le faire. Il n’y a pas intérêt. Son type de système n’est pas compatible avec la transparence. S’il y a une transparence réelle, il peut perdre la majorité au Parlement. Et s’il la perd, cela peut supposer une modification de la Constitution... Pour éviter d’en arriver là, il va maintenir un système électoral opaque. Je doute donc de la capacité de M. Biya et de son système à pouvoir apporter des correctifs pour des élections claires et transparentes au Cameroun.
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